Ci dessous la synthèse fort éclairante sur l’état d’avancement d’une évolution amorcée depuis le décret “Sport sur ordonnance”
Le document complet est accessible à l’adresse : http://www.unpaspourlasante.fr/doc/RapportIGASIGJSAPSMArs2018.pdf
”
[1] L’Organisation mondiale de la santé (OMS) recommande l’activité physique dans un but de santé, principalement en prévention primaire. L’inactivité physique et la sédentarité sont
désormais considérées par l’OMS comme le principal facteur de morbidité évitable dans le monde. Il semble d’autant plus important de promouvoir ces politiques en France que les études montrent
une dégradation des indicateurs de santé de la population en lien avec l’inactivité physique et la sédentarité, surtout chez les femmes et les enfants de plus en plus confrontés aux écrans.
[2] La mission considère que les politiques mises en œuvre doivent mieux distinguer la prévention primaire s’adressant à la population générale, d’une part, et la prévention secondaire et
tertiaire visant des publics atteints de pathologies chroniques, d’autre part.
Concernant la prévention primaire, les recommandations de l’OMS doivent être promues dans le cadre de politiques « sport santé » plus ambitieuses en matière de communication
nationale, en lien avec les collectivités territoriales déjà engagées en la matière (par exemple le réseau français des villes santé). Les pouvoirs publics ont vocation à agir sur les déterminants d’une vie plus active et saine : alimentation, transports publics, gestion des
temps scolaires, soutien au mouvement sportif, etc. A ce titre, la mission recommande d’ériger le « sport santé » en « grande cause nationale » assortie d’une campagne de
communication ambitieuse dans le cadre de l’organisation des Jeux Olympiques et Paralympiques en 2024.
Concernant la prévention secondaire et tertiaire, les études scientifiques (OMS, INSERM1,
Académie de médecine, Haute autorité de santé) démontrent les bénéfices de l’activité
physique comme thérapeutique non médicamenteuse pour un certain nombre de pathologies
(cancer du sein et du colon, diabète de type 2, maladies cardiovasculaires notamment). A ce
titre, la mission recommande de développer les études pour affiner et préciser le contenu de
ces activités physiques selon le profil des patients (l’intensité, la durée et la fréquence
d’activité physique nécessaire pour infléchir le risque de maladie ou son évolution). Le
rapport attendu de la HAS (Haute autorité de santé) sur les recommandations en matière de
prescription médicale de l’activité physique et sportive (APS) avec des référentiels par
pathologie donnera une base scientifique solide de ce point de vue. Par ailleurs, la mission
observe un manque d’études médico-économiques permettant d’évaluer le rapport coût –
bénéfice des activités physiques et sportives sur les comptes sociaux.
[3] Face à ces constats sur la progression de la sédentarité et l’apport de l’activité physique
sur la santé, les pouvoirs publics ont souhaité développer l’activité physique et sportive à des fins
de santé dans le cadre mis en place par l’instruction interministérielle du 24 décembre 2012 et la
loi de modernisation de notre système de santé du 26 janvier 2016.
[4] Grâce à une forte mobilisation des acteurs du « sport santé » au niveau territorial autour
des co-pilotes ARS et DRJSCS2, l’instruction de 2012 a permis un foisonnement d’actions menées
principalement par des acteurs associatifs.
[5] En revanche, compte tenu du caractère dispersé et hétérogène des initiatives locales et
d’un suivi national insuffisant, la mission a rencontré de nombreuses difficultés à faire un état des
lieux exhaustif des actions menées et à consolider les financements associés. Il ressort toutefois des
investigations de la mission sur les plans régionaux « sport santé bien-être » (PRSSBE), les éléments
suivants :
les actions menées ont concerné à la fois des publics variés, parfois au-delà des publics ciblés
par l’instruction, mais peu nombreux au regard du nombre de bénéficiaires potentiels. Par
exemple, l’un des opérateurs du « sport santé » dans le domaine du cancer, la CAMI, dont
l’action est reconnue en France, touche moins de 1000 personnes par an en Ile-de-France sur
300 000 patients en affection longue durée (ALD) cancer. C’est pourquoi la mission préconise
de concentrer l’effort des PRSSBE sur les publics défavorisés et ceux relevant de la prévention
secondaire et tertiaire.
côté Santé, les financements associés n’ont pas pu être retracés au niveau national car aucune
ligne spécifique « sport santé » n’est précisée dans le FIR (Fonds d’intervention régional).
Côté Sports, environ 10 millions d’euros par an sont consacrés à des dispositifs « sport
santé », correspondant en grande partie aux plans régionaux, le principal financeur étant le
CNDS (Centre national de développement du sport). Dans les quatre régions visitées, la
mission a observé une grande variabilité des financements tant dans le montant global que
dans chacune des composantes. Outre ces financements de l’Etat, d’autres acteurs
interviennent au niveau local (collectivités territoriales, Assurance maladie, Mutuelles, etc.).
La mission recommande de construire une grille commune de bilan des PRSSBE avec les ARS
et DRJSCS, dont l’analyse serait confiée conjointement à la Direction générale de la santé
(DGS) et à la Direction des sports (DS).
[6] Outre la mobilisation des acteurs associatifs dans le cadre des PRSSBE, la mission a
constaté une forte appropriation des problématiques « sport santé » par le mouvement sportif au
niveau national, financé par le CNDS à hauteur d’environ 1 million d’euros en 2016 pour le CNOSF
(Comité national olympique et sportif français), qu’il s’agisse de la promotion du « sport santé » ou
de la réalisation et diffusion du MEDICOSPORT, outil de mise en adéquation des activités physiques
et des différentes pathologies. A cela s’ajoute une somme de 380 000 euros pour les fédérations
sportives.
[7] En ce qui concerne la loi santé de 2016 et son décret d’application de 2017, le bilan
portant sur les modalités de la prescription de « sport sur ordonnance » prévu par l’instruction du 3
mars 2017 n’a pas pu être communiqué à la mission. Toutefois, les entretiens menés auprès des
professionnels de santé, des administrations concernées et des acteurs du « sport santé » semblent
montrer un manque d’appropriation par les médecins traitants d’une initiative encore peu relayée
auprès des professionnels de santé et non prise en charge financièrement par l’Assurance Maladie.
[8] Pour la mission, l’instruction de 2012 comme la loi de 2016 et son décret d’application ne
permettent toutefois pas de lever les principaux freins au développement de l’activité physique et
sportive (APS), notamment :
[9] |
la mise en œuvre opérationnelle des recommandations scientifiques ; la formation des médecins et des intervenants ; le financement des activités physiques et sportives. S’agissant de la formation des intervenants, le dispositif règlementaire, encore lacunaire, a |
précisé les domaines d’intervention des professionnels titulaires d’une certification délivrée par
l’Etat (masseurs-kinésithérapeutes, ergothérapeutes, psychomotriciens, enseignants en APA –
activité physique adaptée -, éducateurs sportifs) selon le profil (appelé phénotype) des patients en
affection longue durée (ALD). Mais le cadre doit encore être complété pour les autres intervenants,
notamment les titulaires de certificats de qualification professionnelle (CQP), titres à finalité
professionnelle et diplômes fédéraux. Malgré les efforts de clarification réalisés, la mission observe
que la mise en œuvre de ce cadre demeure complexe. Elle recommande, en outre, la définition d’un
socle commun de formation « sport santé ».
[10] Par ailleurs, la mission considère que le concept des « maisons sport santé », que le
gouvernement souhaite mettre en place, doit être bien défini avec un cahier des charges précis
avant leur mise en place, afin de pallier les freins répertoriés plus haut et d’éviter tout dérapage
financier. En prenant appui sur les structures déjà existantes (réseaux locaux de coordination,
maisons de santé pluridisciplinaire, communautés professionnelles territoriales de santé), ces
maisons « sport santé » devraient :
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jouer un rôle d’animation de réseau sur un modèle de « guichet unique » ; être un lieu d’accueil et de mutualisation des ressources ; permettre l’orientation du public vers une activité adaptée à partir d’une évaluation médico sportive et motivationnelle préalable ; s’assurer du respect d’un cahier des charges (qualification des intervenants en particulier), éventuellement via une forme de labellisation ; assurer un suivi des patients en lien avec le médecin traitant et dans le respect du secret médical. La mission recommande aussi la création d’un site Internet recensant l’offre d’activité |
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[11] |
physique et sportive à des fins de santé qui pourrait être confié à une nouvelle structure regroupant
l’ONAPS et le pôle ressources national « sport santé bien-être ». Ce site Internet pourrait s’articuler
avec le futur Service public d’information en santé (SPIS) prévu par la loi de modernisation de notre
système de santé du 26 janvier 2016.
[12] Enfin, la mission tient à souligner que les expériences mises en place reposent sur une
fragilité des financements, dont les critères dépendent des stratégies régionales et locales. S’il ne
s’agit évidemment pas de remettre en question les partenariats qui ont pu être opportunément
tissés, il revient à l’Etat d’assurer une homogénéité des financements afin de garantir un modèle
économique plus pérenne pour les structures financées et éviter les inégalités territoriales.
[13] La question du financement par l’Assurance maladie des activités physiques et sportives
pour les patients en ALD doit être tranchée en amont de la mise en place des maisons « sport santé
», sur le fondement des référentiels que la HAS doit prochainement publier. Ainsi, il pourrait être
expérimenté un financement du « sport santé » par l’Assurance maladie qui pourrait intégrer les
comités de pilotage des PRSSBE. Ces financements seraient ciblés, en prévention primaire, sur les
publics défavorisés et, en prévention secondaire et tertiaire, sur les patients en ALD pour lesquels
l’APS constitue une thérapeutique non médicamenteuse scientifiquement reconnue.